Placeholder

Rubrique Point_Virgule

Le prix du pétrole, c’est aussi de l’alchimie !

On sait que le pétrole possède en premier lieu une dimension économique car c’est un bien marchand, soumis à une logique d’offre et de demande qu’on pourrait penser qu’elle est suffisante par elle-même. Les grands acteurs de la scène pétrolière que sont les grandes compagnies pétrolières internationales ont eux-mêmes des logiques d’action essentiellement économiques et financières. Alors qu’il a longtemps été directement fixé par les compagnies pétrolières internationales puis, à partir du choc pétrolier de 1973, par les pays producteurs, le prix du pétrole est dorénavant établi, en termes de lieu d’émission, sur les marchés. Mais cette dimension économique pure n’est cependant pas le seul déterminant du prix ni parfois le paramètre dominant. D’autres facteurs rationnels et irrationnels combinés jouent un rôle tout aussi important dans le processus de fixation des prix, ce qui fait qu’ils relèvent à la fois des mathématiques et de la martingale au jeu, en d’autres termes, des lois de la chimie et des effets de l’alchimie !
C’est ainsi que la géopolitique et la psychologie des marchés jouent aussi leur inévitable rôle dans des proportions pas faciles à déterminer. La psychologie des acteurs des marchés est un facteur des plus importants : nervosité, fébrilité, panique et attentisme dus à un évènement politique ou économique exceptionnel ; marché déprimé ou tendu : ces termes sont souvent utilisés pour décrire l'état psychologique des acteurs du marché. C’est évident, la psychologie des acteurs détermine leur comportement en tant qu'acheteurs ou vendeurs. Jeu des plus complexes.
Dernier exemple en date, le prix baril de Brent ou du WTI de cette fin de semaine corrélé à la guerre au Proche-Orient et notamment à son extension de faible intensité dans la péninsule Arabique où les Houtis yéménites entretiennent une vive tension géopolitique du côté de Bab El Mandab, l’hyper stratégique passage énergétique sur la mer Rouge. En un laps de temps court, le même paramètre d’incertitude géopolitique, c’est-à-dire la menace houtie immédiate sur l’approvisionnement mondial en pétrole, a été appréciée différemment par les acteurs des marchés. Elle a d’abord joué en faveur d’une remontée relative des prix puis contribué assez rapidement à leur stabilisation.
Les cours du pétrole ont en effet reflué, vendredi et samedi, les marchés relativisant alors la portée des attaques des combattants Houthis en mer Rouge, tandis que le traditionnel équilibre entre offre et demande continue de poser question. C’est ainsi que le prix du Brent, pour livraison en mars, a effacé 0,68%, pour clôturer à 78,56 dollars. Quant au West Texas Intermediate (WTI), avec échéance en février, il a perdu 0,90%, pour se fixer à 73,41 USD. Il avait pourtant pris initialement de la hauteur, affichant peu de temps avant jusqu'à 1,12% de gain en séance, avant que la tendance ne s'inverse, les cours restant néanmoins dans des marges resserrées. «Malgré les craintes et les discussions sur ce qu'il se passe en mer Rouge, il n'en reste pas moins que l'on n'a toujours pas perdu de pétrole», avait commenté à ce sujet un analyste de l’agence spécialisée new-yorkaise Again Capital.
Peu de temps avant, les prix évoluaient en petite hausse vendredi, portés par les mêmes craintes du marché de ruptures d'approvisionnement en raison des mêmes tensions au Moyen-Orient, mais restaient tempérés par les inquiétudes quant à la demande, notamment venant de Chine. Le prix du Brent, pour livraison en mars, gagnait alors 0,68%, à 79,4 dollars, alors que le WTI), pour livraison en février, prenait 0,86%, à 74,22 dollars. Là aussi, les marchés réagissaient à la montée des tensions au Moyen-Orient, où les conséquences menacent d’envelopper toute la région et de bloquer la route de la mer Rouge, très empruntée par les pétroliers.
Dans ce contexte de tension et d’incertitudes, les États-Unis avaient mené vendredi de nouvelles frappes contre des sites contrôlés par les Houthis, abritant des lanceurs de missiles. Elles intervenaient après qu'un navire marchand américain avait été visé par des tirs, jeudi, dans le Golfe d'Aden. Selon un autre analyste du cabinet Eurasia Group, les Houthis ont indiqué le même jour qu'ils ne considéraient pas les cargos saoudiens et émiratis comme des cibles. En outre, un membre de la direction politique des Houthis avait assuré au quotidien russe Izvestia que les navires chinois et russes bénéficiaient eux aussi d'un «passage sécurisé» en mer Rouge. Le fait de ne prendre pour cible que les navires américains est «un élément négatif pour le marché du pétrole», a estimé l’analyste, ajoutant qu’«avec les Iraniens, dont (les Houthis) sont les alliés, cela fait beaucoup de producteurs majeurs qui ne sont pas dans leur viseur. (…), et pour le marché, cela reste donc des événements à faible risque» pour les flux de brut, en l'état. Comme on le voit, le même paramètre de risque, apprécié à l’aune de données politiques et économiques variables dans le temps serré, a donné lieu à des appréciations différenciées du contexte du marché, influant du coup sur la psychologie des acteurs, et donc sur l’appréciation de la mécanique complexe de fixation des prix !
Les risques de perturbation de l’offre demeurent cependant, mais il y a aussi des facteurs baissiers, notamment l’économie mondiale en phase de ralentissement, de même que la problématique de l’unité et la cohésion de l’OPEP. La production de ce cartel historique a légèrement augmenté en décembre par rapport à novembre, selon des chiffres publiés récemment. Cette hausse avait entraîné le marché à s'interroger sur la capacité de l’organisation à tenir ses engagements de réduction de production, pris fin novembre par plusieurs de ses membres et certains alliés de l'accord OPEP+.
Cependant, l'absence de ruptures réelles d'approvisionnement en brut pour le moment plafonne les gains des deux références mondiales. La hausse des prix du pétrole reste par ailleurs limitée par les craintes persistantes d’un ralentissement économique en Chine, premier importateur mondial. Les cours étaient aussi déprimés par les prévisions de l'Agence internationale de l'énergie (AIE), selon laquelle «le marché apparaît raisonnablement bien approvisionné pour 2024», la hausse de production dépassant la croissance de la demande. L’AIE a souligné dans son dernier rapport mensuel à destination des investisseurs, publié jeudi, que l’offre mondiale de pétrole devrait en 2024 atteindre un niveau record, sauf perturbations majeures au Moyen-Orient, tandis qu'un ralentissement de la croissance de la demande est attendu. Dans le même temps, la demande mondiale de pétrole devrait voir sa croissance ralentir fortement en 2024, sous l'effet des difficultés économiques, mais aussi des progrès de l'efficacité énergétique et de l'essor du parc de véhicules électriques dans le monde, toujours selon l'Agence.
Sur le même sujet de l’évolution de l’offre et de la demande, l’AIE et l’OPEP continuent de diverger considérablement dans leurs évaluations du marché pétrolier. Selon le rapport mensuel de l’OPEP, publié 24 heures avant celui de l’AIE, la demande de pétrole est partie pour connaître en 2025 une «croissance robuste», s’orientant vers un nouveau record, malgré les appels d'experts du climat à réduire la consommation d'énergies fossiles. Entre l’évaluation de l’AIE et la vision prospectiviste de l’OPEP, les analystes pensent toutefois que les prévisions de l’Agence internationale sont considérées comme beaucoup plus réalistes par le marché, lui-même pouvant faire preuve de versatilité et de relativité.
N. K.

Placeholder

Multimédia

Plus

Les + populaires de la semaine

(*) Période 7 derniers jours

  1. Affaire USM Alger - RS Berkane La décision de la CAF tombe !

  2. Alger 22 blessés dans une explosion de gaz survenue dans un logement à El-Malha

  3. Demi-finale aller de la Coupe de la CAF Le match USM Alger - RS Berkane compromis, Lekdjaâ principal instigateur

  4. Le stade Hocine-Aït-Ahmed de Tizi-Ouzou pourrait abriter le rendez-vous La finale se jouera le 4 mai

  5. Coupe de la CAF, le match USMA-RS Berkane ne s’est pas joué Les Usmistes n’ont pas cédé au chantage

  6. Temps d’arrêt Lekdjaâ, la provocation de trop !

Placeholder