La Coupe du monde de l’hypocrisie

En appréciant les paradoxes, on peut dire que le Qatar a réussi d'une certaine manière la Coupe du monde de football. Jamais un tel événement n'a été autant commenté et suivi que cette édition qatarie. Plusieurs mois avant le coup de sifflet premier, la presse du monde entier ne parlait que de ça. Les politiques, dans les pays occidentaux, faisaient assaut de piques à l’endroit de l’émirat énergétique. Bref, c’est le buzz permanent.
Boycott, pas boycott ? Le réalisme a fini par s’imposer. Trop de fric en jeu, trop de gloriole aussi ! On en oublie les ouvriers tués pendant les travaux de réalisation des infrastructures nécessaires à la Coupe du monde ! Passées à l’as, les atteintes aux droits de l'Homme ! Relativisée, la condition de la femme au pays musulman. On en parle, on le ressasse, mais ça ne mange pas de pain. On y va quand même.
Le paradoxe, ou appelons cela par son nom, l’hypocrisie est résumée par la position d’un homme d’état européen qui a décidé de boycotter la Coupe du monde sauf si son pays parvenait aux quarts de finale. Ça change quoi aux droits de l’Homme, à la condition de la femme au Qatar, si l’équipe de son pays parvenait aux ¼ de finale ?
On pourrait entendre quelques-uns des arguments des pays occidentaux s'ils n'étaient entachés de cette profonde hypocrisie. Si le Qatar est arrivé à ce niveau de richesse et d'exploitation qui lui permettent d’organiser une Coupe du monde en faisant construire des infrastructures futuristes, c'est aussi grâce à la complicité active des pays occidentaux qui acceptent de lui vendre armement et entreprises. La puissance économique du Qatar est aussi le fruit de la complaisance de ces pays.
Et les journalistes mainstream ont beau continuer à fustiger l’évènement, à répéter en boucle les éléments de langage, la Coupe du monde se tient. Et les équipes s’engagent à fond pour la gagner. L’argent est au-dessus des principes. Hélas ! Ce qu’il aurait fallu boycotter, ce n’est pas la Coupe du monde de foot au Qatar, mais le Qatar lui-même !
A. T.