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Rubrique Point_Virgule

Ah la belle CAN !

De mémoire de chroniqueur sportif qui regarde le foot africain de sélection à la télé depuis 1980, jamais CAN n’aura été aussi spectaculaire, aussi qualitative, aussi surprenante et aussi réjouissante, bref, aussi belle que la 34e édition gagnée par des Eléphants hitchcockiens et bénis des dieux du ballon rond !
Erma Bombeck, journaliste, écrivaine et humoriste américaine, a dit un jour «quand un homme regarde trois matchs de football d'affilée, il devrait être déclaré légalement mort». Pour n’avoir raté qu’à peine une dizaine de matchs sur les 52 rencontres de la CAN-2023 qui s’est jouée en 2024 en Côte d’Ivoire, le chroniqueur du «Point-virgule» est mort… de plaisir et plus d’une fois ! Cette CAN ivoirienne aura été donc celle de tous les désirs et de tous les plaisirs. En tout cas celle qui a fait démentir les pronostics et fait exploser toutes les statistiques. C’est la «CAN du siècle», l’ont ainsi surnommée supporteurs ivoiriens et internautes africains !
Cette CAN, qui a été jouée dans des écrins architecturaux en guise de stades, est aussi celle qui a bouleversé la géopolitique du foot africain. Elle a modifié le rapport de force en renvoyant prématurément chez elles les «grandes» nations africaines données comme favorites au sacre final, notamment celles qui ont remporté le plus de titres ou qui étaient les mieux placées dans le classement FIFA. A l’image de l’Egypte (7 Coupes), le Ghana (5 titres), ou bien de l’Algérie et du Sénégal dernier et avant-dernier vainqueur, ou encore du Maroc, premier pays africain à rejoindre le dernier carré d’un Mondial et le mieux positionné dans le classement FIFA. Ces nations huppées du foot continental se sont vite retrouvées le bec dans l’eau !
Cette version colorée de la CAN aura donc été marquée par des coups de théâtre sensationnels, par une communion inédite entre les ressortissants de différents pays africains et par une grande ferveur dans les stades comme sur internet, en dépit d’un problème de billetterie ayant favorisé au départ une certaine désaffection du public. Rapidement baptisée «la CAN du siècle» sur les réseaux sociaux, cette édition aura finalement enregistré un large succès populaire qui n’a rien d'étonnant pour Frank Simon, rédacteur en chef du site 2022mag.com et spécialiste du football africain. Il a salué «un tournoi extrêmement festif, un tournoi où on a eu plus de supporters et de spectateurs dans les stades que lors des éditions précédentes».
Au-delà de l’ambiance, joyeuse et conviviale, donc, cette CAN est celle qui a enregistré le plus de buts, comparée aux éditions précédentes. Il y a eu en fait peu de matchs sans but. Au total, 114 ont été inscrits, soit une moyenne de 2,20 buts par rencontre, alors que l’édition la plus prolifique a été la CAN-2008, avec 99 buts et un ratio de 3,09, ce qui en fait le chiffre le plus élevé, sachant que cette édition s’est jouée avec seize équipes comparativement à la 34e CAN qui y a vu participer 24 nations. Et, cerise artistique sur le ballon, on a vu des buts spectaculaires, des buts d’anthologie dignes du football brésilien des années Pelé ou de celui de l’Ajax d’Amsterdam de Johann Cruyff !
CAN des surprises par excellence, des surprises agréables bien entendu, elle a indéniablement favorisé l’émergence de nations naguère marginales, mais qui ont beaucoup travaillé et amélioré substantiellement leur niveau de préparation et de jeu. Des pays comme la Guinée équatoriale, le Cap-Vert ou encore la Mauritanie ont pu se qualifier ou sortir en tête de leur groupe à l’issue des phases de poules. Un sacré bouleversement ! Le parcours des Ivoiriens durant la compétition, lui aussi, tient du miracle. Les Éléphants se sont qualifiés à certaines étapes, in extremis et au bout du bout du temps et du suspense, à l'issue d'une phase de poules désastreuse.
En effet, la nation hôte abordait les matches à élimination directe avec un triste bilan : deux défaites pour une seule victoire et cinq buts encaissés contre deux marqués, et une raclée mémorable contre la rafraîchissante Guinée équatoriale (4-0). Bilan de ce parcours chaotique : un changement brusque de staff, marqué par la mise à l'écart du sélectionneur français Jean-Louis Gasset, remplacé au pied levé par le novice ivoirien Emerse Faé, ancien adjoint sans expérience de coach digne de ce nom, promu ainsi numéro un. Mais, à la surprise générale, grâce à lui, la Côte d’Ivoire a admirablement forcé son destin, réussissant même à décrocher la lune en s’octroyant une troisième étoile de champion tout à fait méritée.
Cette CAN ivoirienne a été aussi une CAN politique. Un geste symbolique de la sélection congolaise avant la demi-finale à Abidjan (7 février 2024), a aussi marqué la compétition. Pendant que résonnait l'hymne national de la RDC, en amont de la rencontre face aux Eléphants, les Léopards avaient une main sur la bouche, un ou deux doigts de l'autre main pointés sur la tempe. Un geste symbolique fort pour signifier «on nous tue et le silence règne» dans une région de l’ex-Zaïre où ont lieu des massacres ethniques à huis clos.
Médiatisé par les joueurs de la sélection nationale lors de ce tournoi, le geste marquant s'est répandu jusque dans le gouvernement de la RDC. Il a été mimé par le porte-parole, ministre de la Communication et des médias, Patrick Muyaya. Un geste puissant et des brassards noirs portés par les joueurs, en signe de solidarité avec les victimes des exactions armées dans l'Est, en particulier dans la province du Nord-Kivu. La région est effectivement en proie à une rébellion armée des plus violentes et soutenue, selon les autorités congolaises et un rapport de l'ONU, par le Rwanda voisin.
Difficile de mentionner enfin les temps forts de cette 34e édition sans évoquer le phénomène du «Coup du marteau». Titre fétiche de la CAN, il est signé du jeune artiste ivoirien Tam Sir, tout juste âgé de 25 ans et devenu en quelques jours l’auteur de l’hymne officieux de la CAN. Son clip a dépassé les 20 millions de vues sur YouTube en l’espace de seulement 48 heures. Détrônant, au passage, l’hymne officiel de la CAN Akwaba, la chanson qui signifie bienvenue du groupe populaire Magic System. Un tube sensationnel et un succès foudroyant à l’image de la sélection de Côte d’Ivoire elle-même.
Mais qu’est-ce qu’elle fut belle cette CAN !
N. K.

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